Cognac2021

Jour de marathon ! Ce matin-là, comme souvent en semaine, la journée débuta par un lever à 5h pour faire 1h30 de route pour rejoindre Jarnac et pouvoir se garer près de la zone départ-arrivée. Parti par temps sec, j’essuyais quelques petites bruines sur la route, pour finalement profiter d’un petit miracle en arrivant, la pluie avait cessé à quelques encablures du parking.

Puis j’allais vite percevoir la dotation coureur, un joli coupe vent et une bouteille de Cognac pour se mettre dans l’ambiance, devant la façade imposante de la maison Courvoisier dont les barriques exposent leurs rondeurs à travers de grandes baies vitrées, laissant imaginer l’or qu’elles recèlent, face à la Charente.

 Aujourd’hui, c’est Tigrou qui fait son grand retour, lui qui n’était pas sorti de sa cage à souvenirs depuis 8 ans, lors du marathon de Sauternes 2013.

Je sors mes peintures pour me faire la gueule du tigre, les croc’s sont déjà raccord (les crocs aussi). Une chose est sûre, dans mon babygro, je ne vais pas voir froid !

Sur l’aire de départ, c’est l’ambiance d’avant-course des festifs. Nombre de mes acolytes habituels sont là, entre I Rhum Man, Marino Flamenco, Moïse, Jésus, les bretons, nombre de Kékés du bocage… et Bikila déguisé en coureur (beaucoup trop) rapide, il est incroyable, plus le temps passe, plus ses temps baissent !

J’étais inscrit ici l’an dernier, et c’est donc un report de dossard, autant dire que j’en attends beaucoup.

 

La course sera globalement une belle traversée de paysages charentais, entre champs fraichement moissonnés, vignes aux couleurs d’or, ponts en pierre très anciens plus beaux les uns que les autres, qui enjambent la Charente, demeures fortifiées, manoirs et grandes demeures charentaises;
Le peloton ne comptant que 500 coureurs, nous serons vite un peu seuls… Après avoir parcouru trop vite les 5 premiers km,  - moins de 30 minutes -, j’ai ralenti la cadence après le 1er ravito vers Bourg sur Charente, où je me suis prudemment réhydraté, me contentant d’un bon verre de pineau, et repoussant les dégustations de Cognac pour un peu plus tard…C’est un peu plus loin que j’ai reconstitué un duo gagnant avec PGaz, à partir du 10éme. Nous ferons toute la traversée ensemble, en papotant beaucoup, et en profitant longuement de chaque arrêt au stand, accueillis avec un grand sourire à chaque fois.

Km12. C’est curieux, une réflexion me vient systématiquement à cette marque, en pensant qu’un marathon c’est parait-il 30km d’échauffement suivis de 12km de négociation avec soi-même, je me projette mentalement dans 18km, et au km30 je repenserai à ce moment… il s’en passe des choses, dans un cerveau de vieux marathonien !

Arrive très vite le 13ème km, où nous traverserons les impressionnants chais de la maison Louis Royer à l’occasion d’un fabuleux et inattendu ravitaillement, offrant huitres, saucisses, entrecôte et autres pâtés, le tout généreusement arrosé de pineau, dry ou avec Schweppes, et de Cognac. Des bouteilles prestigieuses ornaient la table… Sur le moment je me suis dit que si c’était le teaser de la suite du parcours, ça n’allait pas être facile ! Malheureusement, les ravitos suivants seront beaucoup plus modestes, voire classiques pour un sur deux (vous savez, les tables avec des verres d’eau et de coca, accompagnés de tucs, fruits secs, céréales et oranges… et quand même de petits toasts de riettes ou de boudin, voire une goutte de pineau ou de Cognac !). Dur de repartir de cette étape qui avait tout du ravitaillement témoin d’un…40ème km ! Globalement nous aurons un ravito tous les 5 km…Ce qui me fait dire que le coté festif de l’événement est surtout lié aux deux soirées de la manifestation, la pasta party de vendredi soir, et la 3ème mi-temps samedi.

Tiers-course et fin de première boucle à Jarnac où nous retrouvons la zone départ-arrivée, avec les arrivants du 10km et beaucoup d’animation à laquelle on doit renoncer! Nous traversons à nouveau la Charente pour filer vers Graves Saint-Amand, que nous atteindrons après avoir passé le semi en un peu plus de 2h30.

Tigrou rencontre toujours un joli succès auprès des petits enfants, et j’ai beaucoup tapé de petites mains, c’était amusant de voir des tout petits aller se réfugier derrière les jambes de Papa ou Maman, alors que la grande sœur venait me faire un high five ! Les Croc’s font toujours réagir aussi, j’en fais la promotion à chaque fois…

Nous avons eu un ravitaillement sauvage vers le km26 au village d’Angeac si je me souviens bien, le monsieur nous offrant quelque breuvage de sa fabrication (une boisson d’homme), avec pâté de chevreuil ou de sanglier maison. Le terroir parle quand, avec son opinel il fait un petit signe de croix sur la baguette avant de la couper !

De nombreux petits ponts de pierre médiévaux - XIIème siècle si j’ai bien lu - aux formes aigues, mariant angles et arrondis se succèdent, notamment du coté de Vibrac, offrant des reflets dans l’eau tout en symétries C’est le genre d’endroit où le marathonien peu soucieux de son chrono cède la place au photographe…

Depuis longtemps déjà nous rattrapons régulièrement Jean-Marie, vaillant vétéran aux couleurs des Rapetou de Toulenne (Sud-Gironde), qui marche en réalité, tout courbé et tendu par l’effort vigoureux et constant. Il ne s’arrête quasiment pas aux ravitaillements où nous prenons toujours quelques minutes, de ce fait, c’est une poursuite permanente, avec un gentil petit mot à chaque fois. On se félicitera après la ligne d’arrivée !

Après le ravito du 30ème km, une toute petite averse nous rafraichit un peu plus, et comme nous ne  sommes pas pressés, sans honte aucune,  on s’abrite sous un arbre pendant 2 – 3 minutes…Il faut dire que ma peau de tigre est une étuve, je dégouline à l’intérieur et je ne tiens pas à refroidir l’ensemble par l’extérieur !

Les km défilent sous ce ciel désormais menaçant, nous amènent dans la cour du château de Triac où une des dernières petites collations nous est proposée, puis au km 37 dans une très belle distillerie au hameau de Lartige, les établissements Pinard Frères et Fils les bien nommés, d’abord par le parking pour un petit ravito classique musical, puis dans le chai que nous traversons sur un tapis bordé de tonneaux entourés d’alambics au cuivre rutilant dégageant des vapeurs de chauffe… Nous goûtons au passage un toast au boudin accompagné d‘un bon verre de Bordeaux rouge, tout en discutant avec Hubert, patron et co-inventeur du marathon du Médoc, qui nous offre au passage la broche des Festiviales du Challenge de la Convivialité…un bon moment de partage bien au chaud qu’il fut difficile de quitter pour repartir dans le gris !

 

Petit à petit nous commençons à entendre les sons de la ville, où nous terminerons en 5h30 pile cette balade charentaise. Une très belle médaille et une belle bouteille de liqueur de Cognac nous seront remises en ultime récompense. Tout le monde est arrivé à bon port, chacun à son rythme et selon ses objectifs de performance ou de tourisme oeno-sportif, Bikila en 3h20 confirme une nouvelle fois le fait que les 15 jours qu’il a de moins de moi pèsent lourd dans la balance chronométrique (et peut-être aussi son talent) !

En venant ici, et du fait de la réputation de gros festif de ce marathon du Cognac, je m’étais dit que je terminerais le parcours un peu fatigué par les « vrais » ravitos, par conséquent j’avais loué un petit gite en peine campagne à quelques km de Jarnac, pour éviter d’avoir à faire la route de retour juste après la course au risque de finir dans un fossé, voire dans une cellule de dégrisement ! Ce ne fut pas le cas, je veux dire que j‘ai fini ce marathon plus que dignement !  De plus, la source de Schweppes-Cognac qui devait couler soi-disant à flots à l’arrivée était déjà tarie depuis longtemps, sans doute asséchée par les hordes du semi-marathon (il faudrait que les organisations pensent aux vrais coureurs festaïres pour ce genre de ravito post-effort…)

Je me suis donc inscrit sans vergogne en dernière minute à la fameuse 3ème mi-temps à la salle des fêtes évoquée plus haut, une chouette soirée avec un orchestre survitaminé, lancé par une banda. Petits fours, petits plats, Schweppes-Cognac (enfin!!), bons gâteaux et vins à volonté étaient au programme. A voir la grosse ambiance sur la piste de danse on pouvait se demander comment il est possible que les courses de longue distance laissent si peu de traces… 

Mais comme j’avais croisé les gendarmes en pleine séance d’alcootest à un rond-point en allant prendre ma douche cet après-midi (pas cool en ce jour, c’est si facile…), je me suis vite rabattu sur l’eau minérale, quel gout étrange, et quittai mes compagnons pour retrouver mon gîte (point de képi sur le trajet) et repartir tranquillement le lendemain matin. On considérera que ce nouveau festif à mon palmarès servit de dernière répétition avant le grand rendez-vous du Beaujolais le samedi suivant…

 

* Le récit de mon marathon de Sauternes 2013 s’intitule « Tigrou au pays de l’Or »…. Un autre or !