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Košice 2023 - Courir l’Histoire

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J’étais inscrit de longue date pour cet événement européen, la centième édition du Košice Peace Marathon en Slovaquie orientale, plus vieux marathon continental, et deuxième plus vieux marathon au Monde après Boston. Un Marathon pour la paix à moins de cent kilomètres de l'Ukraine, c’était impossible de rater cette occasion ! Pour profiter pleinement sans aucun effort d'organisation de cette destination originale, nous avons signé chez Sportifs à Bord et sa patronne Elisabeth, mon Tour Operator préféré avec qui j’ai couru 9 marathons en Europe depuis 2001! On ne change pas une formule gagnante. Un 10ème voyage pour une 100ème édition, c'est cohérent… Et, ah oui, Košice se prononce “Ko-Chi-Tsé” !

 

Vendredi.

Après une première partie de voyage par le rail, c’étaient les retrouvailles avec les habitués de SAB à l’aéroport Roissy CDG.

Deux vols plus tard, après une rapide escale à Vienne, nous nous installions à l'hôtel Hilton DoubleTree en plein centre ville, the place to be, car accueillant entre autres l'organisation du marathon et les coureurs stars. La chambre offre une vue plongeante sur l’aire d’arrivée du marathon, et à 3 minutes de l’aire de départ, what else !

Une petite marche par un grand beau temps nous amène au retrait des dossards , les drapeaux de la 100e édition flottent au vent et partout dans la ville.

Après une déambulation en fin d'après-midi nous finirons à la terrasse d’un petit resto - brasserie dans la rue piétonne face à la cathédrale Sainte-Élisabeth (je ne crois pas au hasard…). Apéro - pasta - pizza… on y était !

 

Samedi.

Journée touristique dans les environs avec notamment la visite du château de Spiš (Spišsky Hrad), au nord de Prešov, monumental site fortifié médiéval construit au début du 12ème siècle, qui m’évoque Château Gaillard, le château de Richard Coeur de Lion en vallée de Seine près de Rouen. Cet ensemble spectaculaire perché sur un rocher calcaire domine la région environnante de 200m, il est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO (malgré une chambre de torture terrible et impressionnante avec son exposition “pas de pitié pour les torturés”!).

Puis nous allons nous promener dans la ville voisine de Levoča visiter son église gothique Saint-Jacques (12ème-13ème siècle), dotée du plus haut maître-autel en bois au monde, et un temple de belle facture où un quatuor répète son répertoire en prévision du concert de ce soir. Bach, Vivaldi résonnent dans la nef.

En début de soirée nous allons assister à la cérémonie d’ouverture de cette 100ème édition du Košice Peace Marathon, avec allumage de la flamme, discours officiels, concert populaire à grands renforts de lasers, sur la place accueillant le mémorial du marathon, une sculpture de bronze représentant un coureur nu, branche de laurier à la main sur un piédestal de granit avec les noms de tous les vainqueurs gravés pour l’Histoire.

La tradition SAB sera respectée ensuite avec notre pasta party privative dans un des salons de l'hôtel.



Dimanche

Le parcours du marathon est constitué d’une boucle à parcourir deux fois, un semi-marathon se courant aussi. Il y a également un relais à 4 coureurs.

La première partie traverse la vieille ville, très scénique avec un enchaînement incroyablement riche de monuments plus spectaculaires les uns que les autres tout au long de Hlavnà : la cathédrale Sainte-Elisabeth, plus importante cathédrale gothique de Slovaquie construite entre les 14ème et 16ème siècles, la chapelle Saint-Michel, un monumental Théâtre d’état, le blason de la ville, grande sculpture de bronze, des restes des premiers murs de la ville datant du 13ème siècle, la colonne de la peste rappelant l'épidémie du début du 18ème siècle…mais c’est un passage un peu délicat avec de nombreuses portions aux pavés bien irréguliers, et la traversée de lignes du  tramway. Vigilance et regard bas ! 

On en sort par la place où trône la stèle du marathon. Suivent alors des enfilades de routes un peu moins glamour à travers la ville moderne, et son style austère typique de l’Europe de l’Est, grands immeubles carrés longeant de larges avenues. Mais toujours le public est présent et chaleureux avec les coureurs. Nous avons droit aussi à un passage nature en faisant le tour du parc Anička, des bois et des espaces verts, si utiles pour les pauses techniques…

La météo est idéale, à peine frais le matin, la température montera doucement avec la dissipation des brumes matinales. Peu de vent, à peine une petite brise par endroits sur ce circuit relativement plat, on aura 100m de D+ cumulé à l’arrivée.

Un peloton de 5000 coureurs est annoncé au départ, pour un peu plus de 4000 classés à l’arrivée, c’est un bonheur particulier de retrouver cette ambiance de pelotons internationaux dans les sas !

Tout le groupe porte fièrement le très beau t-shirt tricolore de SAB, une manière d'être repérés de loin pour notre photographe attitré. Tous ont décoré leur visage d’un tattoo tricolore. A mon habitude je l’ai un peu renforcé par un élégant mouvement qui me barre le visage, et complété par de larges marques courant sur les 2 mollets. Et bien sûr j’ai de belles croc’s multicolores aux pieds, ma paire inaugurée à Orta et rodée au Médoc !

 

Les coureurs trépignent en attendant le départ, quand soudain Vivaldi explose dans les enceintes, la troupe s’ébranle,... et c’est parti !

J’ai perdu le groupe avant le départ, qui est parti pendant que je procédais à ma dernière vidange pré-course à l’hôtel… Je prends un départ tranquille en fin de peloton. On traverse la vieille ville par la rue Hlavnà passant en revue la cathédrale et l'enfilade des monuments décrits plus haut. Le peloton est dense ainsi que la foule massée derrière les barrières, c'est la fête ! 

Nous partons vers l’ouest, et nous éloignons de cette bulle d’ambiance pour aller vers la fameuse zone verte du parc Anička (km 3,5).

Après une boucle dans ce coin de campagne, on se retrouve vite sur de larges boulevards. 

 

Km 8. Pascal apparait dans mon champ de vision, en mode warrior comme toujours, je fais la jonction juste avant de croiser Liz et son appareil photo. Elle assure le reportage photo avec Eric tout le long du parcours.

 

Au km 9 je rattrape Frédérique la martiniquaise venue amortir son séjour continental en enchaînant Paris-Versailles et 2 marathons! Selon sa propre expression, elle court “en élastique”, et me déposera rapidement à la (dé)faveur pour moi d’un arrêt vidange urgent, il y en aura 4 en tout sur le 1er semi, (détail crucial, mais ça m’a rendu dingue ! A chaque fois 2 minutes perdues à chercher un endroit dans cet environnement très urbain  - à l‘étranger j'ai plus de scrupules qu'en France - … C’était vraiment un jour sans (vessie) pour moi aujourd'hui !!).   

 

Au km 13 je rejoins la flamme des 4h30, belle cible pour moi car ça fait un bail que je ne suis pas passé sous cette marque, avec le temps qui passe, je m'éloigne peu à peu de ce chrono… et je décide de rester derrière même si en ce début de course mon niveau de forme et d'énergie m’incitent à passer devant sans forcer. Par deux fois je les perdrai pour un arrêt au stand, par deux fois je les rattraperai tranquillement. Le km 14 est passé en 1h27, c’est le moment de la traditionnelle multiplication par 3… 

 

Km 16. Juste après le bâtiment de la philharmonique de Košice sur Moyzesova, un orchestre classique avec chœur joue divinement bien sur une petite placette, les notes m’emportent, c’est un moment de grâce… suivi quelques centaines de mètres plus loin d’enceintes survitaminées crachant un rock métal à arracher le marathonien poète de sa rêverie… 

 

L’approche de la mi-course nous ramène vers la vieille ville et la zone de départ, la foule se densifie. Nous sortons d’une grande courbe à droite, (sur Watsonova, ma Garmin m'indique alors 18,8 km), quand soudain une sirène déchire le silence laborieux du peloton, surgis de nulle part des motards nous poussent vers la gauche de la route, puis vers l’intérieur. La voiture chrono passe alors, ouvrant la voie aux deux leaders de la course qui sprintent au coude à coude, un kenyan et un éthiopien, deux formats de poche mais à la foulée de géants, impressionnants… Ils m’ont mis 21 km dans le nez !!  3 autres coureurs me passeront avant que je ne fasse mon demi-tour au semi. L'honneur est presque sauf !!

Sur le 20ème km, nous sommes contraints à courir sur les pavés, bannis que nous sommes de la bande piétonne plus large qui est réservée aux coureurs qui en terminent. Je passe le semi en 2h12 en saluant la foule, souriant intérieurement, tout va bien…

 

Le public enthousiaste nous galvanise, et c’est toujours un plaisir d’aller taper dans les petites mains des enfants, je n’ai pas mémorisé les mots d'encouragement, ne retenant que les “hop hop!”. Malgré ce soutien, c’est un peu compliqué de repartir pour une deuxième boucle en conservant le même rythme, la même énergie… il faut se mobiliser et rester concentré !

 

Les postes de ravitos sont réguliers, proposant eau, énergie, bananes et barres locales ; des orchestres plus ou moins étoffés et dynamiques sont placés tout le long du parcours.

 

Je maintiens à peu près mon allure, en passant le km 28 en 2h56 (c’est le moment de la traditionnelle extrapolation aux ⅔ course). La flamme 4h30 est toujours devant et me décroche peu à peu. Mais je vois bien qu'elle va trop vite ! Donc je ne cherche pas à recoller (d’ailleurs en aurais-je encore les moyens ?)

 

Les km défilent, ma “hernie du sportif” est ressortie, qui tape fort, ainsi que ma douleur au pied droit avec cette inflammation du tendon tibial antérieur. 

Se mettre dans sa bulle. 

Je me concentre sur mon chrono et les fameux calculs prédictifs que je fais à chaque fois à l’approche du 25ème km : “A 7 au kil, ça ferait ce temps-là, à 6’45, …”. Tour de magie mental car je tourne en principe plus vite, et donc à chaque km je gagne du temps sur mon chrono final estimé ! Au départ tout à l'heure, je m’étais fixé un objectif de 4h40, soit ma meilleure performance de l’année (j’ai fait 2 fois 4h39). Plus le temps passe, plus je me motive pour continuer à pousser pour passer peut-être sous les 4h35, voire 4h30 en me disant que ce sera peut-être la dernière fois de ma carrière de coureur… Ça m'a maintenu bien éveillé tout le long ! Après le 30ème km, c’est incroyable le nombre de coureurs que je double (400 sur les derniers 15km), qui marchent, qui rampent, qui sont cuits… Je vis pleinement le moment, j’intériorise mon plaisir, j’avance…

 

L’arrivée approche, la place du monument aux 99 vainqueurs, courbe à droite, secteur pavé et beaux monuments, j’accélère pour la dernière ligne droite, cette fois-ci la bande de bitume hors-pavés nous est ouverte, je fais un brusque petit crochet pour être immortalisé dans mon dernier effort par Frédéric, et finis par passer l'arche d’arrivée  en un peu moins de 4h28 ; je suis super content; c'est mon meilleur chrono depuis presque 2 ans…. Hélène est à l’arrivée avec une autre supportrice.

 

Tout sourire, le souffle court et les ischios engorgés, je courbe la tête pour recevoir la magnifique médaille anniversaire, on me tend un petit sac-récup, et je vais m'asseoir pour savourer l'instant, et papoter quelques instants avec deux jeunes coureurs - surpris par mes croc’s -  qui viennent  de courir leur 1er marathon, je les accueille dans la grande famille en appréciant le moment au soleil tout en dégustant une petite bière sans alcool bien fraîche.

En me relevant, je suis cassé, ma hernie est maintenant bien violente (c’est toujours comme ça à l'arrêt d'une séquence de course mais aujourd’hui j’ai beaucoup demandé à la machine en maintenant longuement mon effort), et je serai plié en deux toute la soirée. Mes ischios et adducteurs ont aussi manifesté leur désaccord... J'ai donc envoyé un message à ma petite kiné pour l'informer de mon résultat, en lui précisant que mercredi elle aurait du boulot !!

 

Après avoir pris le temps de récupérer tranquillement, nous avions en fin d’après-midi un premier rendez-vous pour un petit apéro entre amis, Liz ayant privatisé un salon à l’hôtel. Chacun prévenu longtemps à l’avance avait joué le jeu en apportant une bouteille. Entre coupes de champagne, crémants et vins divers nous avons célébré les vainqueurs du jour ainsi que de nombreux finishers du Six-Stars Abbott Majors, leur grosse médaille autour du cou. Petits fours, bulles et grands rires, la soirée était lancée, et la réhydratation aussi ! 

Nous finirons ce beau séjour par un restaurant typique slovaque, le “Camelot”, bien réputé à Košice, où toutes les calories perdues seront reprises lors du banquet de fin d’aventure avec soupe épaisse servie dans une grosse miche de pain, plats en sauce, canard, porc,  goulash, le tout arrosé d’un merlot d’ici qui tapait fort !

 

Tant sur les plans sportif que culturel ou humain, Košice restera un chaleureux souvenir; le groupe s’est bien entendu entre les retrouvailles des habitués et les nouvelles connaissances. Des projets naquirent, des idées furent lancées, l'avenir dirait… 

J’ai une grande reconnaissance pour Elisabeth (mon premier séjour marathon avec elle date de 22 ans…). Elle concocte à chaque fois des séjours aux petits oignons, où la convivialité domine, loin des grosses machines à dossards.

L’histoire retiendra qu’elle était le seul Tour Operator spécialisé marathon à la centième édition du plus vieux marathon d’Europe !

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Invité
samedi 27 avril 2024

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